Anthologie de textes

(Cécile Davy-Rigaux, Nathalie Berton-Blivet, Monique Brulin, Jean-Paul Montagnier, Marie Demeillez)

Textes normatifs

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Henri Madin, Motets à deux dessus, Paris, Boivin, Le Clerc, 1740

 

Une première étude récente, menée dans le cadre d'une ACI (Action Concertée Incitative : programme de recherche interdisciplinaire intitulé « Liturgie et société en France aux XVIIe et XVIIIe siècles pour une lecture historique et musicologique des rites liturgiques », dir. C. Davy-Rigaux, B. Dompnier, D.-O. Hurel, soutenu de 2003 à 2005 par le Ministère de la Recherche) autour de cet ouvrage post-tridentin par excellence qu'est le cérémonial, a montré tout l'intérêt de la prise en considération des textes normatifs ; ceux-ci permettent d'approcher au plus près, à travers les règles fondamentales qui régentent le déploiement du culte et les idéaux qui les portent, le cadre tant fonctionnel que spirituel ou théologique des différentes formes monodiques ou polyphoniques de la musique d'Église.

Il s'agit d'effectuer un relevé systématique et raisonné de plusieurs types d'écrits normatifs, dont beaucoup n'ont encore jamais été exploités dans une telle optique :

  • Textes de nature législative : recommandations du concile de Trente et édits des conciles diocésains (sources principales : recueils Sacrorum conciliorum de Mansi et ses continuateurs et des statuts synodaux édités aux cours de l'époque étudiée).
  • Textes de nature prescriptive : on relève ici principalement les textes qui concernent la musique dans les cérémoniaux, destinés selon les cas aux cathédrales, diocèses, paroisses, monastères ou ordres religieux. Les cérémoniaux constituent une source essentielle, parmi les différents livres qui concernent la liturgie, pour les indications relatives à la musique que l'on peut y trouver. Le cérémonial servant de référence pour tout ce qui a trait à l'ordonnancement des cérémonies considérées dans leurs moindres détails pour ce qui touche aux ministres et acteurs du culte, à leurs déplacements, leurs vêtements, à leurs fonctions, aux objets et aux décors de l'Église, la musique par conséquent est souvent citée parmi les autres éléments constitutifs de l'apparat cérémoniel. Le cérémonial est particulièrement précieux pour nous informer de la place et de la fonction des motets dans l'office, de la variété des modes d'alternances entre plain-chant à un, deux chantres ou chœurs, orgue, faux-bourdon, chant sur le livre, musique figurée. Ces informations sont toutefois très variables dans leur degré de précision selon les sources, et l'approche essentiellement normative de ces ouvrages conduit à considérer ces informations avec la prudence qui convient dans la mesure où elles donnent une vision idéale du déroulement des cérémonies. Mais on doit être attentif aussi aux manifestations de la pratique vivante qui ressurgissent çà et là dans ces textes, presque à l'insu des rédacteurs.
  • Textes de nature disciplinaire, comme les règlements internes émanés de monastères, confréries, collèges, qui abordent parfois la question de la place de la musique et/ ou du chant ecclésiastique et émettent des recommandations ayant valeur de prescriptions sur leur exécution.

On vise ainsi à disposer d'un ensemble représentatif et aussi complet que possible de textes normatifs permettant des analyses sur les constantes en matière de discipline ecclésiastique musicale et de bienséance et sur la représentation idéale qui les sous-tendent ; ils permettront par ailleurs de mieux cerner la multitude et la nature des adaptations locales et les évolutions apparaissant sur ces deux siècles, tant sur les plans local que national (facilitant du même coup les comparaisons internationales).

Les textes recensés seront publiés sous forme d'une anthologie des textes normatifs en ligne avec un texte d'introduction et des notes de présentation des ouvrages dont ils sont issus.

 

Textes complémentaires relatifs à l'usage

En complément du recensement des textes normatifs, plusieurs autres catégories de textes permettront d'évaluer, d'une part, les améliorations ou pratiques idéales suggérées, d'autre part, la traduction de ces normes à travers les présentations de leurs ouvrages par les compositeurs.

 

  • Textes relatifs à la manière dont étaient pensées les actions. (Monique Brulin)

En complément des textes normatifs, on s'intéresse aussi à ceux qui présentent une réflexion — s'appuyant souvent sur l'histoire de la liturgie et en particulier celle des origines — censée guider la pratique du temps, considérée tant du point de vue des ministres du culte que des fidèles. Ce corpus comprend des textes de natures diverses : théologies de l'office divin (Navarus, Suarez, Cardinal Bona, J. Eveillon, Duranti, Claude Fleury, Le lorrain, Boquillot…) ; ouvrages de liturgistes (Pierre Le Brun, Claude de Vert, G. Grimaud, Grancolas…) ; traités canoniques de l'Office divin (Duguet, Pierre Nicole…) ; ouvrages d'enseignement à destination du clergé et parfois des fidèles (L. Tronson, J.-J. Olier, méthodes et traités de plain-chant, cathéchismes…).

 

  • Ecrits de compositeurs. (Nathalie Berton-Blivet)
Guillaume-Gabriel Nivers, Motets à voix seule, Paris, auteur, 1689, Observation

 

On recense ici les textes concernant les contraintes de la musique d'église et du cadre liturgique tel que formulé par les compositeurs eux-mêmes à travers les préfaces de leurs éditions de motets, livres d'orgues, méthodes ou autres écrits (presse, correspondances ; ex. : Huygens, Gantez, Gobert).
Toutes ces approches se complètent pour tenter de définir et défendre, au-delà des spécificités locales, un comportement régenté du culte, surtout public, au sein duquel la musique et le chant ecclésiastique doivent apporter leur concours à l'édification générale.

Ces données pourront être ensuite confrontées avec la production musicale.